Ablation par cathéter pour troubles du rythme cardiaque : moins efficace qu’espéré
La moitié des patients belges en rechute dans les 2 ans.
La fibrillation auriculaire (FA) est un trouble du rythme cardiaque qui provoque parfois des palpitations incommodantes ainsi que de la fatigue. Des médicaments peuvent atténuer ces symptômes, mais sont sans effet chez certains patients. Pour ces derniers, l’ablation par cathéter pourrait être une solution. Le Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE) a examiné cette intervention de plus près. Le nombre de traitements de la FA par ablation par cathéter a doublé ces dernières années en Belgique. Cependant, il s’agit d’une intervention complexe qui n’est pas sans risques, et la moitié des patients semble faire une rechute après 2 ans. Le cout de l’intervention, près de €10.000, est complètement remboursé au patient par l’INAMI. Le KCE plaide pour une restriction du remboursement aux patients dont les études ont montré que l’intervention leur est la plus profitable, et pour une information préalable au patient des avantages et inconvénients. En outre, l’intervention devrait être effectuée uniquement par des médecins expérimentés dans des centres expérimentés.
Souvent inoffensif pour les plus jeunes, risque d’AVC limité
La fibrillation auriculaire est un trouble du rythme cardiaque commun. Cinq personnes sur 1000 en souffrent chez les cinquantenaires, mais elle devient plus fréquente avec l’âge : plus de 10 % des gens de 80 ans ou plus souffrent de FA.Il ne faut pas confondre la FA et la fibrillation ventriculaire, un autre trouble du rythme cardiaque bien plus dangereux, qui a attiré l’attention avec le décès inopiné de joueurs de football au cours d’une compétition. La conséquence la plus redoutée de la FA est l’AVC, spécialement chez les personnes âgées, les gens souffrant d’autres problèmes cardiaques (insuffisance, valves cardiaques défectueuses, hypertension) ou de diabète. Heureusement, les anticoagulants peuvent diminuer les risques d’AVC.
Généralement, la FA n’est pas un risque en soi pour les personnes plus jeunes. Elle peut être inoffensive, mais source de plaintes, telles que des palpitations ou de la fatigue. Ces plaintes peuvent être maitrisées par des médicaments, mais pour certaines personnes, le résultat n’est pas au rendez-vous. Pour celles-ci, il existe depuis une dizaine d’années l’ablation par cathéter, dans laquelle un cathéter introduit par l’aine est amené dans le cœur pour bruler les zones qui causent la FA.
Doublement du nombre d’ablation par cathéter : pas sans risques
Ces dernières années, le nombre d’ablations par cathéter de la FA a doublé en Belgique (2.100 en 2010). C’est une intervention complexe qui exige une grande expertise. Dans 1 à 3 % des cas, des complications pouvant mettre en danger la vie du patient surviennent. Environ 1 patient sur 20 est confronté à des complications nécessitant une hospitalisation et éventuellement une opération supplémentaire. L’intervention, coutant près de €10.000, est totalement remboursée au patient par l’INAMI.
La moitié des patients rechute 2 ans après l’intervention
À l’aide des données de l’Agence intermutualiste, les chercheurs ont pu déduire que la moitié d’environ 800 patients souffrant de FA ayant subi l’intervention en 2008 en Belgique ont eu une rechute endéans les 2 ans. Un résultat décevant pour une intervention qui coute €10.000 et comprend des risques sérieux pour le patient.Selon la littérature scientifique, l’ablation par cathéter de la fibrillation auriculaire donne les meilleurs résultats lorsqu’il s’agit de soulager de leurs symptômes des personnes jeunes sans autre affection cardiaque, et pour lesquelles les médicaments étaient inefficaces. Les résultats sont nettement moins bons pour les personnes âgées ou atteintes d’insuffisance cardiaque. A ce jour, il n’a pas été démontré qu’une ablation par cathéter réussie peut prévenir la survenance d’un AVC ou qu’un traitement par anticoagulants pourrait être interrompu. Chez les gens souffrant de FA depuis longtemps, l’intervention a des chances de succès plus faibles.
Limiter les interventions et le remboursement
Le KCE recommande donc de limiter le remboursement de l’ablation par cathéter au type de patient pour lequel il a été démontré que les chances de succès de l’intervention sont grandes. D’autre part, les résultats de l’intervention dans notre pays doivent être mieux décrits.
De plus, il est souhaitable de restreindre l’accès à cette intervention aux médecins et aux hôpitaux expérimentés. Actuellement, 30 hôpitaux belges la pratiquent. Six d’entre eux en ont pratiqué moins de 50 en 2011. Six autres en ont fait plus de 100 sur cette même année.
Finalement, les avantages et les inconvénients de cette intervention doivent être expliqués dans une brochure informative. Cette brochure devrait être distribuée au patient obligatoirement avant que la décision de réaliser l’intervention ne soit prise, avec les explications nécessaires.