28 nov 2013 17:15

Plan d’action contre le dumping social

Le Conseil des ministres a adopté un plan d’action de lutte contre le détachement frauduleux de travailleurs de l’UE dans notre pays, phénomène connu sous les termes de "dumping social".

Ce plan d’action opérationnel intègre une série de mesures en vue de garantir une action à la fois plus efficace et plus sévère contre ces infractions lourdes à notre législation sociale et notre droit du travail et contre les structures frauduleuses qui les sous-tendent. 

Contexte

Au sein de l’Union européenne, la libre circulation des services, des biens, des capitaux et des personnes est d’application. Des entreprises, également celles établies dans d’autres Etats membres de l’UE, peuvent prester librement des services en Belgique et faire appel, à cet égard, à des travailleurs salariés ou indépendants originaires d’un autre pays ("détachement"). La libre circulation présente de nombreux avantages et n’est nullement remise en question.

Dans certains secteurs, la Belgique se trouve cependant confrontée à de nombreux abus qui font que des travailleurs belges, petits indépendants et employeurs de bonne foi, souvent des entreprises familiales, se voient évincés du marché. De plus, les travailleurs détachés en question sont gravement sous-payés et travaillent parfois dans des conditions indignes.

C’est pourquoi la lutte contre le dumping social constitue pour le Gouvernement une priorité.

Au cours de la présente législature, de nombreuses mesures légales ou réglementaires (responsabilité solidaire, faux indépendants, mise à disposition, détachement, disposition anti-abus A1, …) ont déjà été prises, en particulier en concertation avec le secteur du transport, de la construction, de la viande et du nettoyage. Les abus les plus graves doivent toutefois pouvoir également être combattus de manière opérationnelle et ce sur plusieurs fronts en même temps.

Le plan d’action prévoit dès lors les mesures suivantes :

  • contrôles ciblés effectués par des équipes spécialisées et coordonnées
  • poursuites pénales transparentes et lutte intégrée contre les phénomènes
  • peines alourdies

Inspection & contrôles ciblés

a) Contrôles relatifs au dumping social effectués par les cellules d’arrondissement

Les auditeurs du travail et les services d’inspection coopèrent dans les cellules dites d’arrondissement. Celles-ci sont présidées par l’auditeur du travail de l’arrondissement correspondant. Au sein de ces cellules d’arrondissement, sur les 12.000 contrôles programmés, 1.500 seront axés sur la constatation de cas de dumping social transfrontalier. L’objectif consiste à procéder à des contrôles bien structurés en vue de constater les abus les plus graves, et ce notamment au moyen du datamining.

b) Contrôles effectués par la cellule ‘dumping social’

Les cellules COVRON du Contrôle des lois sociales (20 personnes) et GOT de l’Inspection sociale (20 personnes avec en renfort 6 personnes supplémentaires dégagées grâce à des glissements au sein de l’IS), 6 représentants de l’inspection ONSS, 5 représentants de l’inspection de l’INASTI et des représentants de l’inspection ONEM constituent une cellule opérationnelle "dumping social".

Un comité stratégique est également mis en place. Celui-ci veillera, dans le respect du principe de la séparation des pouvoirs, au fonctionnement des cellules qui gèreront la lutte contre le dumping social transfrontalier (cellules d’arrondissement et cellule dumping social). Le comité assurera par ailleurs le suivi des travaux, mettra à disposition son expertise et offrira du feed-back au gouvernement fédéral.

Poursuites pénales et lutte intégrée contre les phénomènes

Dans chaque ressort, au moins un magistrat sera chargé à temps plein du droit pénal social et fera par ailleurs office, pour son ressort, de magistrat référent pour le dumping social. La ministre de la Justice prend l’initiative d’épingler le dumping social comme priorité effective des auditorats du travail en matière de poursuites judiciaires.

Le Gouvernement a en outre décidé d’élaborer, d’ici le 1er février 2014, des lignes de force communes qui permettront de mettre au point une lutte intégrée contre les concentrations de phénomènes nocifs dans nos villes. Sont en l’occurrence principalement concernés les quartiers où sévit une vaste économie illégale caractérisées par de nombreux phénomènes de trafic de véhicules, de fraude fiscale, de dumping social, d’escroquerie de trafic et de production de stupéfiants, de blanchiment, de prostitution, de trafic d’armes et de traite des êtres humains. Les ministres de la Justice, de l’Intérieur, des Finances, des Affaires sociales et de l’Emploi, ainsi que le secrétaire d’État de lutte contre la fraude formuleront des propositions en la matière.

Alourdissement des peines

Dans le cadre de la lutte contre le dumping social, les peines seront également alourdies. Sur le plan du droit du travail, le dumping social constitue une infraction à l’obligation de paiement de la rémunération. La gravité de l’infraction à l’obligation de paiement de la rémunération et la connexité avec d’autres infractions manifestes constatées en matière de durée du travail, primes, suppléments, prélèvements illégaux sur salaire, travail du dimanche et travail les jours fériés, sont prises en compte.

Europe

La ministre de l’Emploi, la ministre des Affaires sociales, la ministre compétente pour les Indépendants et le secrétaire d’État à la Lutte contre la fraude examineront si une initiative peut être prise au niveau européen pour améliorer l’échange d’informations entres les services d’inspection nationaux. L’excellente collaboration entre les services d’inspection belges et français dans le cadre du contrôle de l’application des règles de détachement et de la lutte contre le travail illégal et la fraude sociale fait office de cas d’école en la matière, et ce depuis déjà dix ans.

Au niveau européen, les ministres belges continueront notamment à plaider pour que le choix des moyens de contrôle soit laissé aux États-membres. L’instauration de la responsabilité solidaire entre l’entrepreneur principal et le sous-traitant constitue un autre point d’attention important.

Le Premier ministre est prêt à discuter avec le président de la Commission M. Barroso pour voir comment l’Europe peut agir le plus efficacement possible dans la lutte contre le dumping social.