Collaborations entre hôpitaux : remplacer la concurrence par des collaborations structurelles et une répartition des activités
Dans le cadre de la réforme du paysage hospitalier, la Ministre des Affaires sociales et de la Santé publique Maggie De Block avait annoncé que les hôpitaux devraient collaborer de manière plus structurelle afin de mieux se répartir les activités et de coordonner les soins. Les formes de collaboration et les structures de gouvernance actuellement prévues dans la loi ne suffisent plus à soutenir ces objectifs. Le Centre fédéral d’Expertise des Soins de santé (KCE) propose d’introduire dans la législation trois nouvelles formes de collaboration: le système de soins intégré, le réseau coordonné et l’initiative de collaboration autonome. Dans chacun de ces trois modèles, les hôpitaux participants sont pilotés par un organe de décision commun qui détient, selon le modèle choisi, un pouvoir décisionnel stratégique plus ou moins important. Pour éviter une rupture trop brutale avec la situation actuelle et générer suffisamment d’assise pour la réforme, le KCE propose d’accorder une certaine flexibilité aux hôpitaux en les laissant choisir eux-mêmes les formes de collaboration et les structures de gouvernance les mieux adaptées à leur situation. Ils pourront ainsi progresser à leur propre rythme vers plus de collaboration et d’intégration.
Les collaborations actuelles sont souvent insuffisantes
Depuis déjà une dizaine d’années, les hôpitaux belges évoluent : d’entités autonomes et individuelles, ils se regroupent en organisations de soins plus larges qui collaborent entre elles. Différentes raisons expliquent cette évolution : parfois, ce sont les autorités qui les y obligent afin de proposer une offre de soins spécialisés (p.ex. programmes de soins cardiologiques). Dans d’autres cas, ils se voient forcés de réduire leurs coûts face à une pression financière croissante, par exemple en partageant des services de soutien comme un département ICT. Jusqu’à présent, ces collaborations se sont plutôt formées ad hoc et ne contribuent pas suffisamment à la répartition des activités et à la coordination des soins.
Note de vision stratégique provisoire : 25 réseaux hospitaliers locorégionaux
Dans le cadre de la réforme du paysage hospitalier, la Ministre Maggie de Block avait annoncé que les hôpitaux devraient collaborer de façon plus structurelle, de manière à mieux se répartir les activités et à coordonner les soins. Par exemple, certains soins très complexes devront être réservés à des hôpitaux spécialisés (p.ex. pour les cancers rares) et certains types de soins pourront être rationnalisés (p. ex en regroupant des maternités à faible taux d’activité).
Dans sa note de vision stratégique provisoire d’octobre 2016, la Ministre a été plus concrète : elle prévoit environ 25 réseaux locorégionaux d’hôpitaux en Belgique, couvrant chacun environ 400.000 à 500.000 habitants (ou patients potentiels). Chaque réseau (mais pas nécessairement chaque hôpital) offre des soins généraux et spécialisés. Pour les soins très spécialisés, qui ne sont pas disponibles dans tous les réseaux locorégionaux, il est prévu d’établir des collaborations supra-régionales sous la forme de réseaux de référence.
Trois modèles : le système de soins intégré, le réseau coordonné et l’initiative de collaboration autonome
Il existe actuellement trois formes légales de collaboration et de structures de gouvernance : les associations d’hôpitaux, les groupements d’hôpitaux et les fusions. Ces modèles ne suffisent plus à assurer une répartition efficiente des activités. En collaboration avec l’UGent et l’UZ Gent, le KCE a analysé la littérature scientifique et les législations existantes, étudié des expériences menées en Belgique et à l’étranger et consulté les experts de terrain. Sur cette base, le KCE propose d’introduire dans la loi trois nouvelles formes de collaboration : le système de soins intégré, le réseau coordonné et l’initiative de collaboration autonome.
Dans chacun de ces trois modèles, les hôpitaux participants sont pilotés par un organe de gouvernance commun. Le rôle de cet organe central varie selon la forme de gouvernance choisie.
Dans un réseau coordonné, un organe de gouvernance central (le comité de réseau) détient des pouvoirs de décision qui sont clairement délimités par les hôpitaux membres du réseau. Le degré de collaboration dépend de ce que les membres du réseau ont convenu : cela peut être très large ou au contraire se limiter à un programme de soins spécifique.
Dans un système de soins intégré et dans une initiative de collaboration autonome, l’organe de gouvernance central est responsable de toutes les décisions stratégiques. Mais l’objet de la collaboration est différent : dans un système de soins intégré, il s’agit d’une collaboration très large (p.ex. une offre de soins complète répartie sur différents hôpitaux), tandis qu’une initiative de collaboration autonome se focalise, par exemple, sur certains programmes de soins bien déterminés ou sur des services médico-techniques. (Voir aussi l’infographie ci-dessous)
Suffisamment de flexibilité
Pour éviter une rupture trop brusque avec la situation existante et donner une assise suffisante à la réforme, le KCE propose d’accorder de la flexibilité au secteur dans le choix de la forme de collaboration et de la structure de gouvernance la plus adaptée. Les hôpitaux doivent pouvoir choisir le modèle qui s’accorde le mieux avec leurs objectifs de répartition des activités et de collaboration, et qui correspond le mieux aux rapprochements déjà existants avec d’autres hôpitaux. L’objectif, à terme, est d’évoluer vers des collaborations plus intenses lorsque la confiance grandit entre les partenaires, avec un renforcement de la répartition des activités et de la coordination des soins.
Par exemple, un réseau de soins coordonné peut être un premier pas vers un système de soins intégré offrant des fonctions hospitalières générales et spécialisées dans un cadre de collaboration locorégionale. Pendant une certaine période de transition, un réseau coordonné peut être combiné avec des initiatives de collaboration autonomes pour des services ou des programmes de soins bien délimités (sur les plans clinique, légal et budgétaire).
Pour des raisons de sécurité juridique, les formes de collaboration actuelles (associations d’hôpitaux, groupements d’hôpitaux et fusions) doivent encore être maintenues, mais il ne devrait plus être autorisé de procéder à de nouvelles associations ou groupements.
Simplement adapter la loi ne suffit pas
Une simple adaptation de la loi sur les hôpitaux ne suffira pas. D’autres conditions doivent également être rencontrées, telles qu’un financement adapté, un monitoring de la qualité des soins et une détermination des responsabilités en matière de gestion des données et de protection de la vie privée.
Par ailleurs, une « autorité de contrôle de la concurrence en matière de soins de santé » doit pouvoir veiller à ce que la liberté de choix du patient et du médecin ne soit pas trop fortement limitée par la mise en place de ces nouvelles formes de collaboration entre hôpitaux.
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