14 déc 2017 10:17

Avis n° 73 du 11 septembre 2017 concernant l’euthanasie dans les cas de patients hors phase terminale, de souffrance psychique et d’affections psychiatriques

L’avis n° 73 du Comité consultatif de Bioéthique de Belgique, traite essentiellement de la question suivante:
Pour l’application des dispositions légales relatives à l’euthanasie, existe-t-il une nécessité sociale de clarifier le concept de souffrance psychique constante et insupportable qui ne peut être apaisée et qui résulte d’une affection accidentelle ou pathologique grave et incurable ?

Certains membres du Comité ont estimé que cette question pouvait recevoir une réponse brève sans nécessairement entrer dans un débat qui impliquerait de catégoriser des souffrances, voire de les médicaliser.
D’autres membres du Comité ont estimé que ce débat conceptuel était utile et qu’il nécessitait de présenter les résultats d’études empiriques, pour encadrer la discussion éthique.
Ainsi, l’avis se penche entre autres sur le sens à donner à la ‘souffrance psychique’, à la ‘capacité de discernement et au ‘caractère incurable d’une affection’.

Des conclusions et recommandations de l’avis se dégagent plusieurs consensus et trois positions différentes.
Tout d’abord, il y a consensus à propos de la formation des médecins qui devrait accorder plus d’importance à la connaissance précise de la loi relative à l’euthanasie et à la réflexion critique sur son ancrage dans le domaine des pratiques médicales de fin de vie, ce qui suppose également une connaissance des soins palliatifs. Ensuite, en ce qui concerne le caractère incurable des affections psychiatriques, un consensus se dégage également pour considérer que les associations psychiatriques scientifiques de notre pays sont les mieux placées pour énoncer des recommandations en la matière. Enfin les membres du Comité sont unanimes pour estimer qu’il est nécessaire de mener davantage d’études concernant les décisions médicales portant sur la fin de vie et qu’approuver des demandes sans fondement médical reviendrait à ouvrir la porte à une forme extrême de médicalisation – à savoir la médicalisation de certains problèmes sociétaux - ce qu’ils n’estiment pas souhaitable.

Les trois positions à distinguer au sein du Comité sont les suivantes.

  1. Certains membres du Comité estiment qu’il n’est nullement opportun de modifier la loi en ce qui concerne les souffrances psychiques : le législateur avait choisi de laisser une certaine marge d’interprétation de la loi relative à l’euthanasie, notamment pour le concept de la souffrance psychique qui relève de l’expérience subjective du patient et qui doit être entendue par le médecin.
  2. D’autres membres du Comité estiment que la loi n’est pas assez claire et que cette absence de clarté conduit à des application concrètes qui ne correspondent pas à l’esprit de la loi. Ils souhaitent certaines modifications de la loi de manière à mieux tenir compte entre autres de la spécificité des affections psychiatriques. Ils ne remettent cependant pas en question que l’euthanasie pour souffrance psychique puisse être acceptable dans certains cas spécifiques et exceptionnels.
  3. D’autres membres encore estiment que la loi sur l’euthanasie devrait être repensée en profondeur afin d’exclure la possibilité d’une euthanasie en raison d’une souffrance psychique causée par une affection psychiatrique sans lésion irréversible des tissus.

Notez que, dans la partie concernant la discussion éthique, des positions différentes parmi les membres du Comité émergent quant aux thèmes suivants :

  1. les implications (pour la demande d’euthanasie) du refus d’un traitement
  2. le débat sur la fatigue de vivre
  3. la question de la médicalisation de problèmes sociétaux.

Dans les conclusions et recommandations, les divergences se concentrent sur les questions suivantes:

  1. Qui porte la responsabilité de décider du caractère inapaisable de la souffrance ?
  2. Un patient qui refuse une proposition thérapeutique raisonnable et conforme à l’état de l’art, peut-il faire une demande d’euthanasie légitime ?
  3. Une polypathologie répond-elle à la condition légale d’une affection grave et incurable ?
  4. Une évaluation a priori est-elle souhaitable pour des demandes d’euthanasie formulées par des patients en raison d’une souffrance psychique insupportable à un stade non terminal, que ce soit à cause d’une affection psychiatrique ou à cause d’une polypathologie combinée ou non à un problème de fatigue de vivre ?
  5. Le délai d’attente d’au minimum un mois entre la demande écrite et l’euthanasie doit-il être prolongé pour des demandes d’euthanasie en cas d’affections psychiatriques ?
  6. L’exigence légale de consulter un deuxième et, le cas échéant, un troisième médecin, offre-t-elle des garanties suffisantes dans le cas de demandes d’euthanasie émanant de patients atteints d’une affection psychiatrique ou en raison d’une polypathologie ?
  7. Quel est le statut de l’avis des médecins consultés ?
  8. Le fonctionnement de la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie ne manque-t-il pas  de transparence ?

Chacun de ces points est discuté en détail dans l’avis n° 73 disponible sur le site du Comité : www.health.belgium.be/bioeth