17 nov 2012 08:37

Le MRSA en recul : point de départ dans la lutte contre les bactéries hospitalières

Des études menés par l’Institut Scientifique de Santé Publique (WIV-ISP) démontrent que la bactérie hospitalière Staphylocoque doré résistant à la méticilline (MRSA) est en train de perdre du terrain et ce, grâce à une approche conjointe des autorités concernées. Le WIV-ISP et les Laboratoires Nationaux de Référence pour les bactéries résistantes ont réalisé, en 2011, une recherche sur le portage de bactéries résistantes aux antibiotiques chez les personnes âgées. L’étude a porté sur 60 maisons de repos et de soins (appelées « MRS ») belges. En comparaison avec la précédente étude menée en 2005, le portage de la bactérie hospitalière MRSA chez les résidents des « MRS » en Belgique a diminué de 7%. La surveillance nationale du MRSA, menée par le WIV-ISP dans les hôpitaux, montre la même évolution favorable. Les deux études montrent cependant que d’autres bactéries résistantes aux antibiotiques apparaissent. Une approche globale, tant dans les hôpitaux que dans les autres centres de soins, mais aussi dans la population générale, reste donc indispensable.

L’Institut Scientifique de Santé Publique et les Centres Nationaux de Référence pour les bactéries résistantes (UCL, CHU Mont-Godinne et l’hôpital Erasme de l’ULB) ont mené en 2005 et 2011, des études dans 60 maisons de repos et de soins belges. L’objectif était de déterminer combien de personnes âgées étaient porteuses de bactéries résistantes aux antibiotiques. « D’après une comparaison entre les deux études, il apparait que, pour la période étudiée, le portage du staphylococcus aureus résistant à la méticilline (appelées également bactéries hospitalières « MRSA ») a diminué de 7% chez les résidents des maisons de repos et de soins », explique Béatrice Jans de l’Institut Scientifique de Santé Publique. « Une telle tendance favorable a également été observée dans le rapport annuel 2011 de la surveillance nationale des MRSA dans les hôpitaux. Ce travail de surveillance est assuré co-jointement par le WIV-ISP et par le laboratoire de référence des staphylocoques depuis 1994. Depuis 2003, le nombre de patients ayant contracté le MRSA durant un séjour à l’hôpital a diminué de plus de moitié ». Olivier Denis du laboratoire de référence des MRSA à l’hôpital Erasme (ULB) ajoute : « Non seulement, moins de patients contractent le MRSA en hôpital, mais le staphylocoque doré est également moins souvent résistant aux antibiotiques que dans le passé » .

Cette évolution favorable est due aux efforts que la Belgique a fourni ces dernières années afin d’enrayer le MRSA dans les hôpitaux et les établissements de soins de santé. En voici quelques exemples :

  • Les laboratoires de référence et le WIV-ISP suivent de très près l’évolution du MRSA ;
  • La Commission belge de coordination de la politique antibiotique (BAPCOC) a élaboré une politique rationnelle d’usage des antibiotiques pour tous les secteurs afin de lutter contre les futurs développements de la résistance. L'efficacité de cette politique se reflète par les résultats des études réalisées dans les maisons de repos et de soins : entre 2005 et 2011, le pourcentage de résidents avec un traitement antibiotique récent a diminué de plus de 10%.
  • « En même temps, il faut insister sur l'importance de l'hygiène des mains. Pour cela, les différentes autorités belges ont organisé des campagnes d’hygiène des mains dans les hôpitaux et en maison de repos et de soins, afin de lutter contre la transmission de germes par les mains, tant au niveau du personnel soignant, des patients que des visiteurs », a déclaré Anne Simon, de l'Unité d'Hygiène Hospitalière, Cliniques Universitaires St Luc.
  • Les équipes d'hygiène hospitalière et le personnel des maisons de repos et de soins ont élaboré une politique ciblée de prévention de l'infection, avec également une collaboration et une communication de plus en plus systématique entre les deux secteurs. Le dernier point est essentiel car la résistance aux antibiotiques ne connaît pas de frontières.

« Toutes ces actions semblent maintenant porter leurs fruits, mais il y a des efforts supplémentaires à fournir, parce que si le MRSA est en recul, de nouveaux types de bactéries résistantes émergent », explique Youri Glupczynski du Centre National de Référence pour les entérobactéries résistantes à CHU Mont-Godinne (UCL). « Suite à l’utilisation inappropriée d’antibiotiques, des bactéries intestinales à l’origine banales comme Escherichia coli ou Klebsiella pneumoniae ont développé des mécanismes qui détruisent les antibiotiques par la production de l’enzyme « Bêta-lactamase à Spectre Etendu (BSLE) », qui rend le traitement par antibiotiques Bêta-lactames difficile. Ces mêmes bactéries peuvent également produire un autre enzyme ‘Carbapénèmase’ (CPE) qui affaiblit l'efficacité d’autres antibiotiques (les carbapénèmes). En conséquence, l'arsenal d'antibiotiques qui peut encore être utilisé pour traiter ce genre d’infections est beaucoup plus limité et les médecins doivent recourir à des antibiotiques de plus en plus lourds, contre lesquels les bactéries peuvent à leur tour développer une résistance. Il est donc essentiel de briser ce cercle vicieux en n’utilisant les antibiotiques que lorsqu’ils sont vraiment nécessaires », explique Michiel Costers de la Commission belge de coordination de la politique antibiotique (BAPCOC).

« En principe, tout le monde peut être porteur de bactéries intestinales résistantes. Les personnes en bonne santé ne le remarquent généralement pas. C’est uniquement chez les personnes gravement malades ou très affaiblies qu’une telle contamination peut effectivement conduire à une infection », explique Béatrice Jans (WIV-ISP). L'étude nationale réalisée dans les maisons de repos et de soins (2011) montre que le pourcentage de porteurs de « BSLE » dans les établissements de repos et de soins (sans signe extérieur de maladie) est plutôt limité ; seulement 6,2% des résidents étaient porteurs. Cependant, la surveillance dans les hôpitaux montre que le nombre de bactéries résistantes productrices de BSLE a augmenté entre 2005 et 2011 : le nombre de E. coli BLSE+ est passé de 4 % à 7,4 % ; le pourcentage de Klebsiella BLSE+ est passée de 6,9% à 11,6%. Les bactéries résistantes aux carbapénèmes sont également plus fréquentes dans les hôpitaux. Il y a quelques années encore, ce type de résistance était encore rare dans notre pays, mais il est apparu via le transfert de patients venant d’hôpitaux depuis l’Afrique du Nord, l’Europe du Sud et l’Asie. Durant les six premiers mois de 2012, l’on a compté un total de 217 cas de CPE diagnostiqués dans les hôpitaux. « Entretemps, le CPE ne concerne plus exclusivement les voyageurs, mais il concerne également les patients dans les maisons de repos et de soins ainsi que la communauté », explique Youri Glupczynski (CHU Mont-Godinne).
Pour pouvoir endiguer la progression de ces résistances, toute l'expérience acquise dans la lutte contre le MRSA est à présent déployée contre ces nouvelles formes de résistance. « Une approche nationale a été mise en place, avec une surveillance ciblée et des directives spécifiques émanant du Conseil supérieur de la santé dans le cadre de la lutte contre les bactéries CPE dans les institutions de soins de santé », a déclaré Michiel Costers (BAPCOC).
Pour le futur, le message est donc le suivant : rester vigilant, recourir aux antibiotiques avec prudence, et surtout promouvoir l'hygiène des mains. Non seulement dans les établissements de soins, mais aussi en dehors, chez tout un chacun.

Contact

  • Béatrice Jans (Institut Scientifique de Santé Publique) - 02/642 54 20
  • Michiel Costers (Coordinateur médical BAPCOC) - 02/524 85 75

Possibilité pour la presse d’interroger les chercheurs concernés le samedi 17 novembre 2012, entre 13 et 14 heures, à Wolubilis, promenade Henri-Spaak 1, 1200 Woluwe-St-Lambert.

Plus d’infos:

  • Institut Scientifique de Santé Publique : www.wiv-isp.be
  • Commission belge de coordination de la politique antibiotique (BAPCOC) : http://www.health.belgium.be/Antibiotics
  • Campagne d’hygiène des mains SPF Santé Publique : www.handhygienedesmains.be
  • Plate-forme fédérale d’hygiène hospitalière : www.hicplatform.be
  • Centre National de Référence pour les entérobactéries résistantes (CHU Mont-Godinne UCL): http://www.uclmontgodinne.be/
  • Centre National de Référence pour Staphylococcus aureus (Hôpital Erasme ULB): www.mrsa.be
  • Belgian Infection Control Society Belgian Infection Control Society (BICS): http://www.belgianinfectioncontrolsociety.be/
  • Conseil supérieur de la santé : www.hgr-css.be
  • Agence flamande Soins et Santé : www.zorg-en-gezondheid.be et www.zorginfecties.be