Le traitement des escarres de décubitus : un travail d'équipe et des soins personnalisés
En Belgique, plus de 10% des patients hospitalisés souffrent d'escarres de décubitus. On ne dispose pas de chiffres relatifs aux autres environnements de soins dans notre pays mais, si l'on en croit les statistiques européennes, de 6 à plus de 30% des résidents des maisons de repos et de soins y sont également confrontés. Dans le prolongement des recommandations pour la prévention des escarres de décubitus (Rapport KCE 193, janvier 2013), le Centre Fédéral d'Expertise des Soins de Santé (KCE) vient de publier des recommandations portant sur leur traitement. L'éventail des dispositifs et des produits de soins disponibles, tels que matelas, pansements, produits alimentaires et autres, est vaste et ne cesse de s'étoffer. Et pourtant, aucune preuve scientifique fiable n'atteste de l'efficacité de ces produits. Le traitement doit idéalement être personnalisé à chaque patient, et il doit être dispensé par une équipe pluridisciplinaire (infirmières, gériatres, dermatologues, etc.) En outre, le traitement ne peut être interrompu lorsque le patient change d'environnement de soins. Pour mener cette étude, le KCE a collaboré avec l'UGent , la KULeuven, des associations belges de soins de plaies et le très réputé National Institute for Health and Care Excellence (NICE) britannique.
Un inconfort marqué et prolongé
Les escarres de décubitus se développent préférentiellement aux niveaux des talons et du sacrum. Ce sont les parties du corps qui subissent le plus de pression lorsqu’une personne reste longtemps alitée ou en position assise. La gravité des lésions s’échelonne d’une rougeur persistante, qui ne disparait pas à une faible pression exercée sur la peau, jusqu’à l’ulcération profonde qui atteint les muscles et les os. Les escarres de décubitus peuvent s’accompagner d’un sérieux inconfort de longue durée et causer des coûts supplémentaires pour le patient et la société.
Une approche combinée …
Les chercheurs ont procédé à une analyse approfondie des études publiées. Pour aucun des produits et dispositifs pourtant largement répandus dans la pratique quotidienne (matelas, produits alimentaires, pansements, gels et onguents, etc.), ils n'ont trouvé de preuves tangibles de leur efficacité.
Clairement, le patient souffrant d'escarres doit être traité au moyen d'une approche combinée. Il convient de soulager autant que possible la pression subie par la peau (changements de position combinés à des dispositifs de répartition de la pression, tels que les matelas spéciaux) et de veiller à l’état nutritionnel (les patients sous-alimentés sont davantage exposés). La préférence doit également être donnée à des produits et pansements modernes. Quant aux soins, ils doivent être dispensés et suivis par une équipe pluridisciplinaire composée d'infirmiers, de médecins (tels que gériatres et dermatologues), de diététiciens, etc.
… pour des soins personnalisés
Les patients souffrant d'escarres sont souvent en proie à de multiples problèmes de santé. Pour chacun d'entre eux, il convient d'élaborer un plan de soins individualisé, en concertation avec le patient lui-même, les aidants proches et les membres de l'équipe de soins. Ce plan portera notamment sur les différents aspects des soins, sur l'atténuation des symptômes (telle que la prévention de la douleur) et sur la prévention. Le plan doit aussi être régulièrement actualisé, surtout en cas d'évolution de l'état de santé ou de changement d'environnement de soins.
D'autres études sont nécessaires
Malgré l'impact de l’escarre de décubitus sur la santé et sur la qualité de vie des patients, rares sont les études cliniques de bonne qualité qui se sont penchées sur l'efficacité des différents types de traitement. Le KCE plaide pour la conduite d’études robustes complémentaires permettant de comparer l’efficacité de différents traitements, tels que les matelas répartiteurs de pression de haute technologie avec des alternatives de faible niveau technologique (comme les matelas en mousse), ou encore les produits de soins modernes incluant les nouveaux types de pansements de plaies.
Une campagne de sensibilisation pour tous les soignants concernés
Cette série de recommandations relatives à la prévention (Rapport 193, janvier 2013) et au traitement des escarres de décubitus constitue un tremplin idéal à une nouvelle campagne de sensibilisation ciblant tous les soignants concernés. Idéalement, elle devrait aussi être intégrée dans les procédures de travail et dans la formation des soignants. Par ailleurs, les hôpitaux, les maisons de repos et de soins et les responsables des soins à domicile devraient intégrer les programmes de prévention et de traitement des escarres de décubitus dans leur politique globale d’amélioration de la qualité. Le personnel infirmier devrait être impliqué dans cette démarche, mais aussi les gériatres et dermatologues, les médecins coordinateurs et conseillers (MCC) et les généralistes.