08 Juil 2013 02:25

Cancer du sein : le curage des ganglions lymphatiques axillaires n’est pas toujours nécessaire et mieux vaut arrêter d’utiliser le médicament Avastin®

En collaboration avec le Collège d’oncologie, le Centre fédéral d’expertise des soins de santé (KCE) a adapté ses recommandations pour le traitement du cancer du sein aux dernières découvertes scientifiques. En cas de micrométastases, le curage des ganglions lymphatiques est généralement lié à plus d’inconvénients que d’avantages. Le caractère agressif de l’intervention va souvent de pair avec des effets indésirables graves tels qu’une insensibilité de l’extrémité des doigts, ou un lymphœdème dans le bras dû à l’accumulation de lymphe tandis que le risque de récidive reste très faible et que cette intervention n’augmente pas les chances de survie.
Le KCE déconseille le recours au médicament Avastin® dans le traitement du cancer du sein métastatique. Les résultats promis (prolongation de la survie de 5,5 mois) ne sont en effet pas au rendez-vous. De plus, ce médicament coûteux provoque des effets indésirables graves, notamment des hémorragies et des perforations gastro-intestinales. Pour cette raison, l’autorisation de commercialisation de l’Avastin® pour le cancer du sein métastatique a été retirée en novembre 2011 aux Etats-Unis.

EN CAS DE MICROMETASTASES, LE CURAGE GANGLIONNAIRE AXILLAIRE N’EST PAS TOUJOURS NÉCESSAIRE

Lorsqu’on découvre un nodule au niveau des seins, on vérifie avant tout si ce nodule contient ou non des cellules cancéreuses et on procède à un examen du/des ganglion(s) sentinelle(s), soit les ganglions les plus proches de la tumeur. S’il s’avère que ces ganglions ne contiennent pas de cellules tumorales, il est inutile de procéder à un curage de toute la chaîne des ganglions axillaires.

Intervention agressive liée à un risque élevé de lymphœdème dans le bras et d’insensibilité à l’extrémité des doigts

Si des cellules cancéreuses sont découvertes dans le ganglion sentinelle, aujourd’hui, on procède systématiquement à un curage des ganglions lymphatiques axillaires. Le KCE a étudié si, à la lumière des dernières découvertes scientifiques, cette intervention était toujours nécessaire. Il s’agit, en effet, d’une intervention agressive qui comporte des risques d’infection et qui est liée à de nombreux effets indésirables qui peuvent nuire à la qualité de vie, notamment une insensibilité de l’extrémité des doigts et un lymphœdème dans le bras qui enfle à cause de l’accumulation de la lymphe (chez 1 patiente sur 3).

Parfois, cette intervention comporte plus d’inconvénients que d’avantages

Les études récentes ont identifié plusieurs scénarios liés aux tumeurs dans le ganglion sentinelle:


1. le curage axillaire n’est pas recommandé en cas de cellules tumorales isolées ou si moins de 3 ganglions sentinelles sont envahis par des micrometastases (moins de 2mm). Dans ces cas, le risque que d’autres ganglions lymphatiques situés plus en aval contiennent des cellules cancéreuses est très faible et un curage des ganglions lymphatiques axillaires n’augmenterait pas les chances de survie des patientes.


2. En cas de macrométastases (plus de 2 mm) présentes dans maximum 2 ganglions sentinelles on peut envisager de remplacer le curage axillaire par le curage des seuls ganglions sentinelles envahis. Ce scénario concerne les patientes à faible risque de rechute qui subiront une chirurgie de conservation du sein et qui suivront un traitement supplémentaire (chimiothérapie, hormonothérapie, radiothérapie).


Dans ce groupe, le risque de récidive moyen est déjà très faible et la différence entre les 2 procédures est donc très faible aussi : le risque de récidive baisse ainsi de 6 sur 1000 femmes sans curage des ganglions axillaires à 5 sur 1000 femmes si l’intervention est effectuée (c.-à-d. moins 0,14 %).


Le risque de récidive dépend, entre autres, de la taille de la tumeur primitive, de la taille des tumeurs dans le ganglion sentinelle et de la présence de cellules cancéreuses dans les vaisseaux sanguins et les vaisseaux lymphatiques qui entourent la tumeur (envahissement lymphovasculaire). Un modèle de calcul permet d’estimer ce risque pour chaque patiente et cette estimation peut permettre d’éviter des curages ganglionnaires axillaires inutiles.


Il est en tout cas important que la patiente soit bien informée des alternatives, des risques et des éventuelles conséquences de l’intervention avant de prendre sa décision finale.


3. Si 3 ganglions sentinelles (ou plus) sont envahis, le curage axillaire reste recommandé.

L’UTILISATION DU BEVACIZUMAB (AVASTIN®) N’EST PAS RECOMMANDEE EN CAS DE CANCER DU SEIN METASTATIQUE

Le médicament bevacizumab (Avastin®) semblait au départ très prometteur dans le traitement du cancer du sein métastatique. Son fabricant prétendait qu’il allait prolonger la survie de 5,5 mois. Après quelques années, ses résultats se sont avérés décevants : il n’a pas prolongé la survie ni amélioré la qualité de vie des patientes et il a, en plus, provoqué des effets indésirables comme des hémorragies, des perforations gastro-intestinales ou encore des thromboses. Pour toutes ces raisons, en novembre 2011, la FDA (Food and Drug Administration) américaine a décidé de retirer l’autorisation de commercialiser ce médicament coûteux pour le traitement du cancer du sein métastatique.


En Belgique, Avastin® est toujours utilisé et remboursé pour le traitement du cancer du sein métastatique qui ne peut pas être traité par chimiothérapie (ce qu’on appelle le cancer du sein triple négatif). Etant donné qu’Avastin® n’entraîne pas non plus d’amélioration de la survie chez ces patientes, le KCE recommande d’en arrêter l’utilisation.

BON PRONOSTIC : APRÈS 5 ANS PRÈS DE 90 % DES PATIENTES SONT ENCORE EN VIE

Dans notre pays, le cancer du sein est le cancer le plus courant chez les femmes (35 % de tous les cancers). Il touche surtout les femmes entre 60 et 69 ans. Un cancer sur 20 seulement touche une femme de moins 40 ans. Après 50 ans, son risque augmente considérablement. Les pronostics du cancer du sein sont bons : 88 % des femmes touchées par un cancer du sein sont toujours en vie après 5 ans. Après 10 ans, ce pourcentage est encore proche de 79 %.


Le KCE a déjà consacré une grande attention au cancer du sein. En 2007, il a publié un premier guide de pratique clinique (rapport 63), qui a été complètement actualisé en 2010 et en 2012 (rapport 143). Le présent rapport est une nouvelle mise à jour dans la série. Quatre études ont aussi été réalisées sur le dépistage du cancer du sein (rapports 11, 129, 172 et 176) et nous avons publié une étude sur les indicateurs de qualité des soins dans le cancer du sein (rapport 150).