18 jan 2012 13:20

Corrigendum - Quatrième demande d'extradition par la Belgique au Sénégal à l'encontre de H. Habré

Le mardi 17 janvier 2012, la Belgique a demandé pour la quatrième fois au Sénégal l'extradition de M. Hissène HABRÉ, ex-Président tchadien poursuivi en Belgique depuis 2000, notamment pour crimes de torture et crimes contre l'humanité. Cette démarche fait suite au rejet de trois autres demandes d'extradition par les juridictions sénégalaises. Le dernier rejet, pour vice de forme, date du 10 janvier 2012. Pour les autorités belges, qui avaient bel et bien transmis cette troisième demande d'extradition en bonne et due forme, il est essentiel que le Sénégal respecte l'obligation de droit international ‘aut dedere, aut judicare' (extrader ou poursuivre) et, dès lors, extrade M. Hissène HABRÉ vers la Belgique, à défaut de le juger au Sénégal, afin que justice puisse être rendue aux victimes.

Les autorités belges ont appris le 11 janvier dernier, par voie de presse, que la Chambre d'Accusation de la Cour d'appel de Dakar avait déclaré irrecevable la troisième demande d'extradition adressée par la Belgique aux autorités sénégalaises à l'encontre de M. Habré. Ce dernier réside depuis 1990 au Sénégal.

Dans son arrêt n° 07 du 10 janvier 2012, la juridiction sénégalaise se fonde sur deux motifs distincts d'irrecevabilité pour rejeter la demande d'extradition belge. Selon le premier de ces motifs, la Belgique n'aurait pas respecté la législation sénégalaise relative à l'extradition car la copie du mandat d'arrêt international à l'encontre de M. Habré et de ses annexes n'aurait pas été présentée en expédition authentique. Le second motif sur lequel se fonde la juridiction sénégalaise est l'absence du procès-verbal d'arrestation et de mise sous écrou et d'interrogatoire de M. Habré.

Concernant le premier de ces motifs, les autorités belges tiennent à souligner que la Belgique a bien transmis aux autorités sénégalaises les pièces requises par la législation sénégalaise en matière d'extradition, soit le mandat d'arrêt à l'encontre de M. Habré et la législation belge et internationale applicable aux faits qui lui sont reprochés.

Ces pièces ont en effet été transmises :

  • en original, par note verbale du 22 septembre 2005, valant première demande d'extradition. Ces pièces originales sont toujours en possession des autorités sénégalaises ;
  • en copie certifiée conforme et dûment légalisée équivalant à expédition authentique, par note verbale du 15 mars 2011, valant 2ème demande d'extradition. A ce sujet, il est utile de rappeler que l'arrêt de la Chambre d'Accusation de la Cour d'appel de Dakar n° 133 du 18 août 2011 déclarant irrecevable cette 2ème demande d'extradition se fondait uniquement sur l'absence de ces documents en annexe à la note verbale belge du 11 juillet 2011. Or, cette note verbale du 11 juillet 2011 ne faisait que rappeler, en l'absence de toute réaction du Sénégal, la note verbale belge du 15 mars 2011, à laquelle les documents requis étaient bien annexés.
  • en copie certifiée conforme et dûment légalisée équivalant à expédition authentique par note verbale du 5 septembre 2011, valant 3ème demande d'extradition. Cette fois, il semble que ces pièces, dûment remises par la Belgique par la voie diplomatique, n'aient pas été transmises telles quelles à la juridiction sénégalaise compétente, mais sous forme de photocopies.

Quant au second motif d'irrecevabilité invoqué par la juridiction sénégalaise dans sa décision du 10 janvier dernier, la Belgique tient à souligner que, conformément aux termes de l'article 13 de la loi sénégalaise relative à l'extradition, c'est au parquet du Procureur général de Dakar qu'il revient de produire et de joindre à la procédure procès verbal d'arrestation et de mise sous écrou et d'interrogatoire de M. HABRÉ à la procédure. La Belgique insiste donc sur le fait qu'il appartient aux seules autorités sénégalaises de lever ce second obstacle.

La Belgique a remis ce 17 janvier, à l'Ambassade du Sénégal à Bruxelles, une nouvelle et quatrième demande d'extradition à l'encontre de M. Habré. La copie du mandat d'arrêt international et de ses annexes, certifiée conforme par le Greffe du Tribunal de première instance de Bruxelles et dûment légalisée par le Président de ce tribunal, le SPF Justice et le SPF Affaires étrangères a donc, une nouvelle fois, été transmise aux autorités sénégalaises. La Belgique a demandé avec insistance aux autorités sénégalaises que ce mandat d'arrêt et ses annexes en expédition authentique soient transmis tels quels aux autorités compétentes.

La Belgique tient en outre à rappeler qu'elle a toujours été favorable à l'organisation du procès de M. HABRÉ en Afrique, dans le pays sur le territoire duquel il se trouve, sur la base des plaintes déposées et des poursuites engagées en Belgique, en application du principe « aut dedere, aut judicare », c'est-à-dire l'obligation de poursuivre à défaut d'extrader. Pour ce faire, elle a proposé au Sénégal, à de nombreuses reprises, de coopérer, dans le respect des règles de droit international régissant l'entraide judiciaire et a proposé de prendre en charge les frais liés à cette coopération judicaire. Cette proposition n'a pas, à ce jour, reçu de suite concrète.

Enfin, le Gouvernement belge souligne l'importance pour lui de voir justice rendue sur base des plaintes déposées en 2000 et 2001 par des victimes dont des Belges d'origine tchadienne, conformément à son attachement à la lutte contre l'impunité pour les crimes internationaux les plus graves dont font partie ceux reprochés à M. Habré. C'est également pour cette raison qu'il a déposé, en février 2009, un recours devant la Cour internationale de Justice visant à trancher le différend qui l'oppose au Sénégal concernant la bonne application du principe aut dedere, aut judicare. A ce sujet, les audiences sur le fond se tiendront dans les prochains mois.