18 oct 2013 16:32

Procédure d’urgence pour la suspension immédiate des professionnels de santé qui mettent la vie de leurs patients en danger

Sur proposition de Laurette Onkelinx, ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, le Conseil des ministres a marqué son accord sur un avant-projet de loi mettant en place une procédure d’urgence pour la suspension immédiate des professionnels de santé qui mettent la vie de leurs patients en danger.

La suspension d’urgence : une réelle nécessité

Ces dernières années, l’actualité a été émaillée de nombreux faits impliquant des professionnels de santé indélicats ou défaillants : praticiens se faisant remplacer par un non-professionnel de santé, ayant contaminé plusieurs de ses patients à l’hépatite, ou ayant abusé de patientes en état de faiblesse, ou ne disposant tout simplement d’aucun titre professionnel pour exercer…

Ces situations sont inacceptables, car elles mettent la vie ou l’intégrité physique des patients en danger, mais elles nuisent également à la réputation des professionnels de santé qui font dans l’ensemble, un travail remarquable.

Il est donc indispensable  de pouvoir, de manière urgente et dans un délai court, suspendre les activités d’un professionnel de santé qui représenterait un tel danger.

Une telle mesure d’écartement immédiate et provisoire, applicable à tous les professionnels de santé,  n’existe pas actuellement, que ce soit au niveau des ordres déontologiques (médecins et pharmaciens), des commissions médicales provinciales ou des commissions d’agrément.

Et les procédures disciplinaires ordinaires actuellement prévues peuvent prendre plusieurs mois voire plusieurs années avant de trouver leur conclusion.

Les instances qui interviennent dans l’autorisation de pratique des professionnels de santé ne disposent donc pas des moyens d’action leur permettant d’agir rapidement contre les professionnels de santé qui représentent un danger pour leurs patients.

Il en va de même au niveau judiciaire : les professionnels de santé ne peuvent être suspendus préventivement (détention préventive ou mise en liberté sous conditions) que très exceptionnellement et les condamnations pénales ne comprennent que rarement une interdiction d’exercer.

La suspension d’urgence concernera tous les professionnels de santé !

En effet, cette procédure ne concernera pas uniquement les médecins, mais l’ensemble des professionnels de santé, à savoir : médecins, dentistes, pharmaciens, infirmiers, aides-soignants, sages-femmes, kinésithérapeutes et paramédicaux.  De plus, une disposition de la loi du 29 avril 1999 relative aux pratiques non conventionnelles permettra de rendre cette procédure applicable aux pratiques non conventionnelles.

Que propose le nouvel avant-projet de loi ?

L'avant-projet vise à mettre en place deux procédures, pour l’ensemble des professionnels de santé, en cas de risque grave pour la santé publique ou l’intégrité physique des patients.

Ces procédures seront menées par les Commissions médicales provinciales, composées de médecins, de l’inspecteur d’hygiène  et de membres représentant la profession de la ou des personnes incriminées.

  1. Une procédure de suspension en extrême urgence :
    Cette procédure spécifique pourra uniquement être activée pour une période de 8 jours, en cas de risque grave imminent pour la santé publique ou l’intégrité physique des patients. Elle s’apparente à une requête unilatérale, car vu l’urgence extrême, la décision sera prise sans entendre préalablement l’intéressé.
    Au terme des 8 jours de suspension, cette procédure exceptionnelle ne pourra pas être renouvelée tant que le professionnel incriminé n’aura pas été entendu.
  2. Une procédure de suspension en urgence :
    Cette mesure provisoire devra s’appuyer sur une présomption grave (aveux, …) de danger pour l’intégrité physique des patients. Et la mesure provisoire qui aura été prise est valable aussi longtemps que subsistent les raisons qui l’ont justifiée.

Comment fonctionnera cette procédure de suspension en urgence ?

  1. La Commission médicale reçoit une plainte
  2. Elle entendra à huis clos, les arguments du prestataire de soins incriminé. Les droits de la défense sont donc garantis : la procédure sera entièrement contradictoire et le professionnel de santé pourra être accompagné d’un conseil.
  3. La Commission médicale pourra suspendre provisoirement les activités professionnelles du prestataire de soins ou lui imposer des conditions d’exercice.
  4. Le prestataire de soins incriminé pourra aller en appel de cette décision, devant une commission de recours présidée par un magistrat. Il existe 2 commissions de recours pour le pays : une francophone et une néerlandophone. Le recours n’est pas suspensif.
  5. La suspension ou les mesures seront maintenues tant que les raisons qui ont justifié cette suspension ou ces mesures perdurent. Le professionnel incriminé pourra néanmoins, chaque mois, demander à la Commission médicale provinciale - si ses arguments sont entendus - la levée de la mesure prononcée.

Il était essentiel de mettre en place une telle procédure qui de surcroit, répond aux recommandations de la Commission parlementaire "abus sexuels" : comme celle-ci le demandait, ces nouvelles dispositions donnent des moyens légaux et réglementaires aux instances médicales leur permettant de décider de mesures provisoires à l’encontre de médecins ayant commis des infractions à caractère sexuel.

Avant-projet de loi modifiant l’arrêté royal n°78 du 10 novembre 1967 relatif
à l’exercice des professions de soins de santé, l’arrêté royal n° 79 du 10 novembre 1967
relatif à l’Ordre des médecins et l’arrêté royal n° 80 du 10 novembre 1967 relatif à l’Ordre des pharmaciens