19 déc 2023 10:25

Violences entre (ex-)partenaires en cas de divorce : la Belgique doit renforcer la protection des victimes et des témoins

Bruxelles, le 19 décembre 2023 - Les recherches démontrent que le risque de violence augmente en cas de séparation, en particulier le risque de violence mortelle. L’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes s’est penché dans sa dernière étude sur les moyens dont disposent les juges de la famille, le parquet et les notaires (entre autres) afin de mieux détecter les violences entre (ex‑)partenaires en cas de divorce. Le constat est clair : les professionnel·le·s ne disposent pas toujours des informations, des moyens ou d’un cadre législatif approprié. La Belgique doit donc accroître ses efforts afin de mieux protéger les victimes de violence et les enfants dans les affaires de divorce. L’Institut formule des recommandations concrètes qui ont été envoyées hier aux responsables politiques concernés.

"Il existe un lien entre la violence entre (ex-)partenaires et les divorces. Le fait de se séparer de son·sa partenaire ne met pas fin à la spirale de la violence. Au contraire, il peut même s’agir du plus grand facteur de risque de violence mortelle", dit Michel Pasteel, directeur IEFH.

Les professionne·le·s concerné·e·s soulignent l’importance d’être suffisamment formé·e·s sur ce qu’est la violence entre (ex-)partenaires, sur les signaux permettant de détecter une potentielle violence et sur la manière dont ils·elles peuvent intervenir. En particulier dans les cas de divorces conflictuels ou de situations de rupture de contact, il est impératif de procéder à une détection proactive afin d’éviter une escalade de la violence. C’est pourquoi l’Institut recommande la création d’un code de signalement accompagné d’un manuel qui informe les professionnel·le·s sur leurs moyens d’action, tout en tenant compte du secret professionnel.

L’Institut relève en outre qu’il est urgent de procéder à un certain nombre de modifications législatives concrètes dans le Code judiciaire et le Code civil, afin d’assurer une meilleure protection des victimes de violence entre (ex‑)partenaires dans le cadre d’un divorce. Enfin, l’Institut demande que le ministère public soit à nouveau obligatoirement présent, éventuellement en ligne, lors des audiences pour les divorces.

Michel Pasteel, directeur IEFH: "Pour un grand nombre de mesures qu’une juge de la famille peut prendre, seule la violence physique et/ou sexuelle entre partenaires est prise en compte. Il est très important que la violence psychologique et économique entre partenaires soit également reprise dans les articles de loi qui déterminent les possibilités de réaction des juges de la famille. Par exemple, lorsqu’une victime se voit attribuer le logement familial avec de bonnes intentions, mais qu’elle se retrouve seule pour payer le loyer ou le prêt, cela peut avoir un impact supplémentaire énorme sur la victime. Il est également important de faire de la sensibilisation à ce sujet."

Les recommandations de l’Institut font suite à une journée d’étude organisée en septembre dernier et qui avait rassemblé différents professionnels tels que des juges de la famille et des notaires mais aussi des expert·e·s du vécu et des responsables politiques.

L’étude publiée par l’Institut a été menée en collaboration avec les universités de Hasselt et de Namur. Les juges de la famille, le ministère public et les notaires ont été interviewés sur leurs pratiques afin d’analyser les mesures prises et les éventuels manques de moyens à leur disposition pour prévenir les violences entre (ex-)partenaires. 
Premièrement, les professionnel·le·s ne reconnaissent pas les signaux de la violence entre (ex-)partenaires, ni donc les risques d’escalade potentielle. En cas de suspicion de violence, ils·elles doutent encore trop souvent de la conduite à tenir. La passerelle vers les services d’aide constitue un deuxième problème, entre autres du fait des longues listes d’attente. Enfin, l’information circule mal entre les différents tribunaux et entre le·la juge de la famille et le ministère public, ce qui  peut aboutir à un jugement du tribunal de la famille qui ne garantit pas nécessairement la sécurité. Les recommandations formulées par l’Institut visent à remédier à ces problèmes.

Rupture et violence

Une rupture ou un divorce constitue une période à risque  pour les victimes de violence entre partenaires, en particulier lorsque la séparation n’est pas acceptée par l’un·e des partenaires. La majorité des femmes qui ont été victimes de violence entre partenaires continuent de subir des violences des années après la séparation. Une rupture ou un divorce peut également être l’élément déclencheur de la violence, ou aggraver celle-ci.. L’auteur·e essaie ainsi de reprendre le contrôle de la situation. Selon les estimations, on dénombre 140 cas de violence potentiellement mortelle à l’égard des femmes chaque année en Belgique*.

Plus d’info : l’étude concernant le rôle des juges de la famille et des notaires ainsi que les recommandations relatives à la violence entre (ex-)partenaires dans le cadre d’une procédure de divorce sont disponibles sur notre site web.

* On estime le nombre de féminicides à une trentaine par an en moyenne. Ce chiffre est basé sur les informations récoltées dans la presse et sur le blog stop Féminicide. Il n’existe pas encore d’enregistrement officiel du nombre de meurtres ou de tentatives de meurtre dans le contexte de la violence intrafamiliale. Sur base des chiffres du Collège des procureurs, l'Institut pour l'égalité des femmes et des hommes estime, qu'il y a environ 140 cas de violence mortelle ou de tentatives de meurtre entre partenaires chaque année.

Contact presse
Véronique De Baets, porte-parole
T          +32 2 233 40 34
M         +32 479 25 04 41

L’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes a été créé en 2002. Il s’agit d’une institution publique fédérale indépendante qui garantit et promeut l’égalité des femmes et des hommes. Il combat toute forme de discrimination et d’inégalité fondée sur l’un des critères protégés par la Loi Genre, notamment le sexe. Pour ce faire, l’Institut élabore un cadre légal adapté ainsi que des stratégies et des instruments. Le nombre de plaintes et de signalements adressés à l’Institut augmente année après année, et dépasse déjà actuellement les 1000.

Les tâches de l’Institut consistent également à fournir des conseils, à mener des recherches, à donner des formations, à mener des actions concrètes et des campagnes de grande envergure. Près de 70 personnes travaillent chaque jour à l’Institut afin d’accroître l’attention de la société pour l’égalité de genre.

Les victimes ou les témoins de discrimination fondée sur un critère protégé par la Loi Genre (notamment le sexe) peuvent s’informer sur leurs droits gratuitement et en toute confidentialité. Il est également possible de déposer une plainte. Pour cela, contactez l’Institut par téléphone au 0800/12.800 ou via son site internet https://igvm-iefh.belgium.be.