14 oct 2014 02:29

Méningocoque B: trop tôt pour une vaccination généralisée

Un vaccin contre les infections à méningocoque (du groupe B) a récemment été développé. Cette bactérie est surtout dangereuse pour les nourrissons et les jeunes enfants. En collaboration avec l’Université de Bristol, le Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE) a évalué l’impact clinique de la vaccination ainsi que le rapport entre les coûts d’une éventuelle vaccination et ses avantages en termes de santé publique.  Les résultats de l’étude montrent que l’introduction de ce vaccin dans le calendrier vaccinal des enfants ne devrait pas être recommandée à ce jour parce qu’il n’aurait qu’un impact faible sur le nombre de cas et de décès, tout en provoquant beaucoup d’effets secondaires. De plus, il subsiste des incertitudes sur sa durée de protection et sur les fluctuations possibles de la maladie dans le futur. Ces conclusions devront être revues lorsque des données plus solides seront disponibles. À l’heure actuelle, aucun pays européen n’a encore intégré ce vaccin dans son calendrier national de vaccination, mais l’Angleterre et le Pays de Galles envisagent de le faire, à condition que son prix diminue.

Rare mais dangereux, surtout pour les jeunes enfants
Le méningocoque du groupe B peut causer des maladies très graves, telles que la méningite et la septicémie (infection du sang), surtout chez les nourrissons et les jeunes enfants. Ces maladies sont mortelles dans 5 à 10 % des cas. Dans 10 à 20 % des cas, elles mènent aussi à des complications à long terme, dont certaines laisseront des séquelles graves et très invalidantes comme la surdité ou l’amputation d’un membre.

Heureusement, les maladies à méningocoques sont rares. Dans notre pays, on estime leur nombre à 180 par an, dont 140 sont dues au groupe B (le plus répandu des 6 sérogroupes existants). Le nombre de décès est estimé à 6 personnes par an. C’est surtout chez les enfants de moins de 5 ans que le risque est élevé : ils comptent à eux seuls la moitié des cas et le tiers des décès, le risque le plus élevé se situant aux alentours de 5 mois.

Un vaccin récent
La vaccination contre d’autres groupes de méningocoque est possible depuis longtemps, mais le développement d’un vaccin contre le sérogroupe B est tout récent et se base sur une technologie nouvelle. Les autorités de santé doivent à présent faire le choix de généraliser ou non l’utilisation de ce vaccin, et déterminer quel serait, le cas échéant, le meilleur schéma de vaccination. C’est pour aider cette décision que le KCE, en collaboration avec l’Université de Bristol (Grande-Bretagne), a évalué l’impact clinique de la vaccination et pesé les coûts des différents schémas possibles en regard de leurs bénéfices potentiels.

Il reste encore des incertitudes
Étant donné que le vaccin est très récent, il existe peu d’informations sur la durée de la protection qu’il confère. On ne sait pas non plus s’il protège uniquement les personnes vaccinées contre la maladie, ou s’il réduit également la transmission de la bactérie par les porteurs sains, c’est-à-dire des personnes qui sont porteuses du méningocoque sans développer de maladie, mais qui peuvent en contaminer d’autres. Un vaccin qui diminue le portage a un impact plus important car il protège également les individus non vaccinés (par immunité de groupe). C’est par exemple le cas des vaccins contre la variole ou la polio, qui ont permis d’éradiquer la première et d’éliminer la deuxième dans les pays occidentaux.  

Étant donné le manque de données probantes sur l’effet de la vaccination sur le portage et sur certaines autres propriétés du vaccin, le KCE a réalisé ses analyses sur base de différentes hypothèses, développées en collaboration avec des experts externes, les Communautés (compétentes en matière de vaccination) et le Conseil supérieur de la Santé, section Vaccination.

Vaccination des nourrissons : peu de décès évités, mais des fièvres élevées

Les résultats montrent que l’inclusion de cette vaccination dans le calendrier vaccinal des nourrissons ne devrait pas être recommandée pour le moment. En effet, les chercheurs ont établi que le vaccin ne pourrait prévenir qu’un nombre limité de cas et de décès. Par ailleurs, ce vaccin provoque fréquemment des épisodes de fièvre chez les nourrissons, ce qui peut entraîner des inquiétudes, voire des hospitalisations, mais aussi diminuer la confiance des parents envers le programme de vaccination dans son ensemble. Enfin, le coût élevé de cette vaccination n’est pas proportionnel aux bénéfices de santé que l’on peut en attendre.  

Vacciner les adolescents ?

La vaccination des adolescents, qui sont les porteurs les plus fréquents de la bactérie (20 à 30% sont porteurs) mais chez qui la maladie est peu fréquente, pourrait être une stratégie plus efficace que la vaccination des bébés. À condition toutefois que cela permette effectivement de diminuer la transmission de la bactérie, ce qui, à ce stade, n’est pas prouvé. De plus, cet effet ne serait obtenu qu’après 10 à 20 ans de vaccination.

Pour ces différentes raisons, l’étude conclut que l’inclusion de ce vaccin dans le calendrier vaccinal n’est pas recommandée, du moins dans l’état actuel des connaissances. Les médecins et les parents qui choisiraient néanmoins de vacciner des jeunes enfants doivent être informés sur le risque de fièvre élevée, surtout si ce vaccin est administré en même temps que les autres vaccins de routine.

Une conclusion qui pourra être révisée si de nouvelles données sont publiées
Les conclusions de cette étude devront vraisemblablement être revues lorsque de nouvelles données seront disponibles, surtout si un effet sur le portage est démontré. Au moment de l’étude du KCE (juin 2014), aucun pays n’avait mis en place cette vaccination au niveau national, mais l’Angleterre et le Pays de Galles prévoient de le faire, à condition que le prix du vaccin diminue. 

Les conclusions de cette étude ne changent rien au fait que le méningocoque reste un germe mortel ou dévastateur, dont les séquelles à long terme peuvent être dramatiques pour ceux qui y survivent et pour leurs proches. Les décisions en matière de vaccination doivent être basées sur une série de critères; le rapport coût-efficacité n’en est qu’un aspect.              

Pour des informations médicales plus détaillées sur le vaccin contre le méningocoque du groupe B, voir document ci-joint.